« Mes poings sur les i » du montpelliérain Soufyan Heutte a été une révélation littéraire à sa parution en 2017. Au théâtre Jean Vilar, le Primesautier théâtre en a donné une version théâtrale marquante. Nouvelle représentation demain, au théâtre Jacques Coeur à Lattes. Le décor est planté, gris, lumière tungstène d’un ring de boxe. Les silhouettes des figurants pris au hasard dans le public, sont disposées sur le plateau comme des bandes de jeunes. Les postures sont dans l’attente, à l’écoute, rêveurs. Désœuvrés, ils observent ce qui se déroule « calés » sur des blocs de béton ou d’empêchement.
Cette mise en espace nous donne à la fois une impression d’établissement pénitencier, de « mitard », de rues de cité, de parking souterrain. Sur la scène du théâtre Jean Vilar, c’est Soufyan Heutte, lui-même, qui interprète son texte : franc, juste, généreux et poétique pour décrire la vie au « quartier ». On retrouve le Kamel du livre, qui vit et réplique avec ses poings, passe par la case prison où il se livre à une « évasion méditative ».
Pour son premier passage sur les planches, il nous embarque dans une immersion performative, remplie de tableaux illustrant l’exclusion et les frontières sociales, les codes de la banlieue et la réalité de ces résidents. C’est avec une pointe d’humour qu’il dépoussière les clichés et idées reçues sur le sujet.
Qu’on y vive, qu’on y travaille ou qu’on la fuit, la cité s’imprime en nous. Elle laisse une trace singulière, sauvage, indélébile, tendre aussi, à en devenir poète. Une proposition atypique, expérimentale, interprétée en simultané en langue des signes, menée par Antoine Wellens et Virgile Simon pour le Primesautier théâtre. Un moment hors genre nous embarquant, nous questionnant sur les réalités de la vie en cité et le quotidien des individus qui y vivent.
« L’on dit souvent qu’écrire, c’est s’écrire. Je dirais qu’écrire, pour moi, c’est s’écrier. »
