Un paradis urbain imposé
Ces métropoles ne seraient-elles donc pas le paradis qu’on nous vend ? Ne sommes- nous pas si heureux dans ces « techno-cocons » dont parle l’écrivain Alain Damasio ? « Cette croyance repose au fond sur un imaginaire matriciel qui glorifie l’urbain, souligne le chercheur, alors que cette densité urbaine nous a été imposée par l’économie. On a vidé les campagnes ! »
Métropole : le diable !
Pour Guillaume Faburel, la métropole incarne et concentre les maux contemporains : « accélération du mouvement, du tourisme à chaque coin de rue, du divertissement permanent ». Elle est une forme ultime d’aliénation urbaine, le résultat d’un véritable « hold-up » d’élus déjà en place qui ne nous ont « pas conviés à leur construction ».
« Avec Lyon et Bordeaux, Montpellier fait partie du Triangle des Bermudes des métropoles barbares avec des expériences métropolitaines-phare. Elle ont toutes les trois connu une mutation sociologique fondamentale et asséché leur hinterland ».
Il faut réarmer le local
Quant on lui objecte qu’elles sont le point nodal de la décentralisation, et donc porteuses d’une émancipation des territoires, il répond du tac au tac : « Pas quand il s’agit de singer le modèle central à l’échelle locale. Il faut réarmer le local. Je ne suis d’ailleurs pas surpris par le retour du municipalisme, de la désobéissance civile ».
Des idiots utiles
Mais une contestation monte, selon lui, venues des catégories qui ne s’accordent pas bien au mythe : « pas les classes créatives, les jeunes bien formés, les élites internationales qui en sont le ciment sociologique, mais tous les autres qui s’en sentent exclus ». Il parle même d’une « violence psychique et sociale. Certains débranchent, font sécession, fatigués de jouer les idiots utiles des métropoles, les agents involontaires du capitalisme ».
Le numérique : l’aliénation ultime
Aux avant-postes de ces idiots utiles : les hyper connectés. « Le numérique, c’est l’opérateur anthropologique majeur. C’est l’aliénation ultime par son ambivalence même : il crée du lien et en même temps asservit ».
Une gauche productiviste
Pourquoi alors une telle sociologie de gauche dans ces métropoles avec les succès que l’on sait de la France Insoumise aux dernières élections présidentielles à Montpellier ? « Il s’agit d’une gauche productiviste, croissanciste. Elle a un logiciel intellectuel problématique avec un point du capitalisme qu’elle a du mal à franchir ».
Un écocide
Quelles sont les alternatives possibles ? Guillaume Faburel prône le retour à la nature mais pas question d’un retour de la nature au sein-même de ces villes qui « ont plongé l’humanité dans le trépas écologique ». La ville-forêt ? Un gadget ! « Le capital est agile pour se verdir ! Soyons sérieux, l’autonomie alimentaire des 22 métropoles, c’est 3 jours ! Nous n’avons plus le temps pour des solutions intermédiaires ! La métropolisation est un écocide ! »
L’auteur analyse l’émergence d’une nouvelle société hors des grandes villes. Un élan, un avenir est possible, qui passe par la décroissance. « Il donne à voir la multitude et la force des résistances et des expériences qui s’opposent à l’extension sans fin du capitalisme dans nos vies, loin des métropoles barbares ».
Il s’agirait de fonder des communautés dont la taille idéale varie, selon les critères, de 50 à 5000 habitants. Ce que le géographe appelle le « mini-local » sur le modèle de la Zad de Notre Dame des Landes.
Le modèle Gilets jaunes
Cet intellectuel qui se dit bien dans sa peau de géographe militant -« je ne crois pas à l’objectivité, à un savoir purifié, je suis un être de sentir »- ne cache pas son intérêt pour les Gilets Jaunes : « un mouvement né en dehors des métropoles« . Ses rond-points fascinent l’intellectuel bien plus que les happenings citadins de Nuit Debout.