Il chante autant du baroque que Lady Gaga. Entretien avec Yann Golgevit, le contre-ténor montpelliérain dont tout le monde parle, qui confie à Hélène Bertrand-Féline comment il a travaillé et obtenu sa voix de castrat.
Prise de vue : Jérémy Aliot avec Françoise Garcia et Yasmina El Moualem.
Démonstratif et amical avec tous, l’arrivée du dandy contre-ténor dans notre lieu de rendez-vous est celle d’un grand seigneur. Mais d’emblée, le sérieux de son regard et son évidente maîtrise de l’image viennent contredire cette apparente désinvolture.
Un dandy bienveillant
Qu’on ne s’y trompe pas, le contre-ténor montpelliérain est tout sauf un sympathique écervelé : outre son imperturbable politesse, c’est un professionnel hyperactif, attentif aux moindres détails de l’interview, un perfectionniste qui de son propre aveu « adore tout superviser ».Un ovni ?
Un ovni ?
Il adore ce qualificatif, souvent repris dans la presse et il n’a pas tort. Yann Golgevit entre difficilement dans une catégorie et il aime ça. Tordre les codes, revendiquer la liberté de ses choix, c’est son jeu favori et son public le suit au gré de ses fantaisies.
Tombé tout petit dans la marmite
Né dans une famille de musiciens, il écoute à 6 ans un disque de Maria Callas et c’est la révélation : « ce n’est pas tant sa voix que l’émotion qu’elle transmettait qui m’a bouleversé » L’avenir semble tout tracé : études au conservatoire de Montpellier, Maîtrise de Radio France à Paris puis carrière de soliste purement classique sous la direction de chefs prestigieux comme Baremboïm ou Boulez.
La voix des anges
Les contre-ténor sont des barytons qui chantent en « mécanisme 2 » ou falsetto . Cette voix très prisée à l’époque baroque correspond au registre des castrats, ces enfants repérés pour leurs voix très pures et aiguës, qui subissaient une castration visant à bloquer la puberté et le développement de leur cartilage laryngé. Fort heureusement, cette pratique a disparu après une interdiction papale en 1902, et une technique vocale spécifique a remplacé cette barbarie. Reste l’infini et troublant mystère de cette voix plus flexible et aiguë qu’une voix d’homme, plus éclatante et puissante qu’une voix de femme et dont il sait jouer au gré des répertoires qu’il aborde.
De mannequin à chanteur
Éloigné un temps de la scène musicale, Yann Golgevit devient mannequin et côtoie le monde de la pub et du cinéma. Un concert à Londres du groupe Il Divo et c’est le déclic : on peut faire de la musique autrement et cette perspective de liberté ravive en lui le désir de chanter. Son répertoire devient éclectique : comédies musicales, pop et variété avec des incursions dans le répertoire classique.
« Vous écouter m’a donné envie de me battre«
Décidément Yann Golgevit brouille les pistes : artiste certes mais aussi manager et producteur, son appétit frise la boulimie, mais là où l’on attend des failles, on trouve des certitudes : le don de soi, l’empathie. De sa grand-mère rescapée d’Auschwitz, il revendique un héritage humaniste et son engagement est concret : recherche médicale, soutien aux enfants malades et partenariat avec Le Refuge, association qui accueille de jeunes homosexuels bannis par leur famille.
Cet artiste atypique et touche à tout a choisi un répertoire qui lui ressemble : varié, joyeux et surprenant. Sa fierté : évoquer une femme en chimio après un cancer du sein qui lui dit « vous écouter m’a donné envie de me battre« .
Merci pour cette belle interview, très pro de par Hélène B-Féline
et les réponses super intéressantes de notre parrain Yann Golgevit.
PM Meekel pour https://zikoccitanie.fr