On a beaucoup parlé de la représentation de la femme chez Fellini. Pour opposer l’image de l’épouse (Giuletta Masina dans « Juliette des esprits », Anouck Aimée dans « 8 et demi », Anna Prucnal dans « La Cité des femmes »), souvent perçue comme asexuée, au corps mince, ne provoquant plus le désir du mari à l’image de la femme fantasmée, à forte poitrine, nourricière, dévorante, déesse et prostituée qui emprunte autant au sexisme italien, qu’à la mythologie classique ou au glamour hollywoodien.Guiletta Masina, la femme-clown
La première femme de Fellini, c’est la sienne, Giulietta Masina, présente dès son premier film « LES FEUX DU MUSIC-HALL » co-réalisé en 1950 avec Alberto Lattuada. Giulietta Masina qui tournera dans 7 des films du maestro. GM qui ne survivra pas plus de cinq mois au décès de son cinéaste de compagnon. Une collaboration affective et culturelle comparable à celle de John Cassavetes filmant son épouse Gena Rowland ou plus près de nous Robert Guédiguian et Ariane Ascaride.
Dans ce premier film figurait aussi la belle Carla Del Poggio découverte 10 ans plus tôt par Vittorio de Sica qui l’avait fait jouer dans « Madeleine, zéro de conduite ». Carla Del Poggio disparue il y a tout juste 10 ans à l’âge de 84 ans.
Dans le suivant « LES VITELLONI » (les Inutiles-1953), le premier long métrage sans Giulietta apparaît Leonora Ruffo (dite Bruna Falchi née Bruna Bovi), à l’affiche de 1951 à 1969. Elle disparaîtra définitivement des écrans jusqu’à son décès, 38 ans plus tard à l’âge de 72 ans.
La maîtresse de Goebbels
Dans ce même film, il y avait aussi Lída Baarová (de son vrai nom Ludmila Babková) : une actrice d’origine tchèque née à Prague en 1914, décédée à Salzbourg en 2000. Connue aussi pour avoir été durant deux ans (de 1936 à 38) la maîtresse du sinistre dignitaire nazi Joeph Goebbels ! Elle sera du reste incarcérée à la Libération et fera seize mois de détention dans une prison praguoise. S’exilant ensuite en Autriche. Sa villa à Prague sera confisquée par les autorités du pays. Elle jouera un peu au théâtre et tournera quelques petits films en Espagne et Italie. C’est là que Fellini lui confie le rôle de l’antiquaire dans son film. Ensuite, elle sombrera dans l’alcool.
Retour à Giulietta dans le classique des classiques : « LA STRADA » où Giuletta partage l’affiche avec Anthony Quinn pas encore Quasimodo dans « Notre Dame de Paris » (ce sera 2 ans plus tard) et pas encore non plus « Zorba le Grec » (10 ans plus tard !). Pas non plus encore papa de 13 enfants (dans la vraie vie). Masina avec son nez de clown dans ce film : une légende est née.
Elle sera présente aussi dans le suivant « IL BIDONE » qui voit aussi débuter à 15 ans Lorella De Luca mais celle-ci ne fera qu’une assez courte carrière avant de mourir en 2014, à 73 ans.
Dans le film suivant, datant de 1957, « LES NUITS DE CABIRIA« , Giulietta tient une fois encore la vedette (avec François Perrier) mais figure aussi au générique Franca Marzi laquelle jouera aussi aux côtés notamment de Marcello Mastroianni et Vittorio Gassman avant de décéder à 62 ans en Lombardie dans une bourgade proche de Milan.
Autre actrice à figurer au générique du même film : Dorian Gray de son vrai nom Maria Luisa Mangini qui avait empruntée ce pseudonyme à l’héroïne du livre d’ Oscar Wilde. Elle n’aura eu que quinze petites années de vie artistique. De 1965 à 2011 plus aucun film à son actif jusqu’à son suicide par arme à feu à l’âge de 83 ans.
Anita Ekberg, la femme-fontaine
En 1960, c’est Anita Ekberg (1931-2015) qui capte toute la lumière dans le fameux « LA DOLCE VITA » et la non moins fameuse scène dans la fontaine de Trévise.
Dans ce film des Françaises se font remarquer : Anouk Aimée qui tournait encore, l’an dernier, à 87 ans, le troisième volet d’ « Un homme et une femme » de Claude Lelouch.
Egalement Magali Noël (1931-2015), comédienne et chanteuse avec le célèbre « Fais moi mal Johnny, Johnny » où elle chante aux côtés de Boris Vian, et qu’on reverra par la suite dans d’autres films de Fellini comme « Amarcord ».
Enfin, l’assez étonnante Yvonne Furneaux de son vrai nom Yvonne Élisabeth Scatcherd, native de Roubaix et aujourd’hui âgée de 92 ans. Elle tournera 20 ans de 1952 à 1972 avant de se retirer définitivement à Lausanne en Suisse.
1963 : l’année Claudia Cardinale
C’est en 1963 et dans « HUIT ET DEMI » que la belle Claudia Cardinale fait son entrée dans l’univers fellinien. Elle a 25 ans. Une grande année pour elle puisqu’elle tournera aussi pour l’autre grand maître italien Luchino Visconti, cet autre chef d’œuvre : « Le Guépard ». L’affiche de la 42ème édition du festival, c’est elle.
Au casting du même film : une autre native de Tunis, de 5 ans son aînée (elle en a 87 aujourd’hui) : Sandra Millo. Malgré sa sensualité et sa forte personnalité, celle-ci aura une carrière en pointillé.
Anouk Aimée est encore au générique. Mais aussi Rossella Falk (de son vrai nom Rosa Antonia Falzacappa 1926-2013) et son faux air d’Annie Girardot, qui fut directrice artistique du Teatro Eliseo de Rome, de 1981 à 1997.
La comédienne britannique Barbara Steele, âgée aujourd’hui de 82 ans.
La française Madeleine Lebeau (1923-2016).
L’italienne Caterina Boratto (1915-2010) qu’on reverra deux ans plus tard sous les caméras de Fellini dans « Juliette des Esprits » mais surtout en 1976 dans « Salo ou les 120 journées de Sodome », le film si controversé de Pasolini.
En 1965 : retour de Giulietta Masima dans un des films les plus emblématiques du maestro. Un des plus mystérieux aussi. « JULIETTE DES ESPRITS« . A nouveau aussi à l’affiche : Sandra Millo et Caterina Borattomais. Ou encore l’italo-croate native de Zaghreb Sylva Koscina (1933-1994).
Et Valentina Cortese (1923-2019).
Valeska Gert, la danseuse
Egalement au générique du même film l’étonnante Valeska Gert (de son vrai nom Gertrud Valesca Somes) danseuse et humoriste décédée en 1978 à 86 ans. Pratiquant une danse provocante et virulente, elle avait fuit Berlin sa ville natale pour New-York se promettant d’y revenir seulement quand les nazis en seraient loin. Elle ne tourna en définitive que dans fort peu de film. L’un sous la direction de Jean Renoir (« Nana » en 1926) et 50 ans plus tard : « Le coup de grâce » sous la caméra de son compatriote Volker Schlöndorff.
Aussi à l’affiche : Luisa Della Noce (1923-2008).
Silvana Jachino (1916-2004)
Et Milena Vukotic, 85 ans aujourd’hui.
Dans « SATYRICON » en 1969, c’est le retour de Magali Noël qu’on reverra encore dans « Amarcord ». Mais aussi l’ex-mannequin Capucine vue dans les aventures de « La Panthère Rose » de Black Edwards, décédée à Lausanne en 1990 de façon des plus tragiques puisqu’elle s’est défenestrée.
Dans ce péplum, on peut voir aussi la belle Lucia Bosè, décédée le 20 mars dernier à Ségovie de la Covid-19, à l’âge de 89 ans.
Difficile d’oublier dans ce film la présence d’un mannequin à la beauté galvanisante : Donyale Luna (de son vrai nom Peggy Ann Freeman), native de Détroit dans le Michigan et décédée d’overdose à Rome en 1979 à seulement 34 ans.
L’espièglerie du maestro était telle qu’il fit jouer le rôle de l’empereur César à… une femme. En l’occurrence la française quoique née à New-York : Tanya Loper, 78 ans aujourd’hui
Dans « LES CLOWNS » en 1970, bizarrement pas de Giulietta et pourtant… C’est le couple mythique Pierre Etaix-Annie Fratellini, quasiment la sœur jumelle de madame Fellini.
A l’affiche aussi dans ce film : un autre couple très circassien, Jean-Baptiste Thierrée et son épouse Victoria Chaplin-Thierrée (69 ans désormais), l’une des filles de Charlie Chaplin. Créateurs tous deux du Cirque Imaginaire et ensuite du cirque Invisible. Victoria que son père avait fait tourner à 16 ans dans son ultime film « La comtesse de Hong-Kong » (avec Sophia Loren et Marlon Brando).
Egalement au générique Liana Orfei, l’actrice, artiste de cirque et chanteuse italienne ( 83 ans aujourd’hui) appartenant à la grande famille des Orfei.
« Je salue la fraternité des hommes et Anna Magnani »
Dans « FELLINI ROMA » en 1972 : peu de femmes à la notable exception de la grande, de l’immense Anna Magnani qui décèdera du reste l’année suivante, à 65 ans. Ce sera son ultime rôle. Le premier cosmonaute russe Youri Gagarine dira à son propos en 1961 : « Je salue la fraternité des hommes, le monde des arts et… Anna Magnani« . Le choix de la tragédienne n’est bien entendu pas le fruit du hasard mais on devinera sans mal l’hommage appuyé que Fellini entendait rendre au grand Roberto Rossellini et son film phare de 1945 : « Rome ville ouverte ».
Aussi dans ce film Elisa Mainardi (1930-2016).
Dans « AMARCORD » : impossible de ne pas saluer Maria Antonietta Beluzzi (1930-1997) à la poitrine débordante de générosité. On a fini par la confondre avec ce film dans laquelle elle incarne une buraliste qui met au défi le jeune Tita de la soulever, puis qui en récompense, dénude son opulente poitrine face à l’adolescent. Incarnation du fantasme fellinien par excellence.
Dans sa version de « CASANOVA« , Fellini qui a confié le rôle-titre à l’acteur américain Donald Sutherland a songé à Mary Marquet (1895-1979), 81 ans à l’époque du film, pour lui faire jouer sa mère. L’actrice française mais native de Saint-Pétersbourg décèdera 3 ans plus tard.
Une des maîtresses du grand séducteur sera interprétée par Marie-Christine dite Tina Aumont (1946-2006), fille du comédien Jean-Pierre Aumont.
Autre femme séduite par le courtisan : Diane Kurys alors comédienne, dont ce sera le dernier rôle puisqu’elle passera de l’autre côté de la caméra l’année suivante en réalisant « Diabolo menthe », son premier film.
Egalement au générique les actrices italiennes Carmen Scarpitta (1933-2008).
Olimpia Carlisi (née en 1946).
Mais aussi l’américaine Sandy Allen (1955-2008) réputée la femme la plus grande du monde (2,31 mètres de son vivant !)
Dans « PROVA D’ORCHESTRA« , peu d’actrices hormis Clara Colosimo (1922-1994) qui était aussi harpiste.
En revanche dans « LA CITÉ DES FEMMES« , excepté Marcello Mastroianni : une impressionnante distribution qui commence par la chanteuse polonaise Anna Prucnal (née à Varsovie en 1940) débarquée depuis peu à Paris et qui confiera plus tard n’avoir pas compris grand chose à ce que Fellini lui demandait…
Aussi la britannique Bernice Stegers (née à Liverpool en 1949).
Donatella Damiani (de son vrai nom Donatella Casul) vue aussi dans quelques films français.
Autres actrices italiennes : Fiammetta Baralla (1943-2013).
Et Gabriella Giorgelli, 79 ans, également vue chez Pasolini et Bertolucci.
Pina Bausch dans « Et vogue le navire »
En 1983, dans « ET VOGUE LE NAVIRE » : place à la britannique Barbara « Mary » Jefford (1930-2020) décédée le mois dernier à 90 ans, et retour à Elisa Mainardi vue précédemment dans « Satyricon ».
Présence surtout de l’immense chorégraphe allemande : Pina Bausch jouant la princesse Lherimia.
Et de la belle sud africaine Janet Suzman.
Dans « GINGER & FRED » retour enfin de Giulietta (Masina) aux bras du fidèle Marcello. Ce diable de Federico arrivant même à faire jouer au photographe de légende Jacques-Henri Lartigue le rôle de Frère Gerolam.
En 1987 dans « INTERVISTA« ; Fellini se met lui même en scène aux côtés toujours de Mastroianni et retour à nouveau d’Anita Ekberg.
Mais aussi de la jeune Antonella Ponzian, 23 ans à l’époque, 56 aujourd’hui.
De l’actrice allemande Lara Wendel, guère plus âgée (55 ans aujourd’hui).
Et enfin de l’italienne Eva Grimaldi (59 ans).
Dans son ultime opus « LA VOCE DELLA LUNA » (en 1990), si on trouve l’acteur évoluant plutôt dans le registre comique, on se souvient de Roberto Benigni et même le français Sim (jouant du hautbois dans le film) mais guère d’actrices de renom ni même au générique.
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