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« Petite Maman » : du grand Céline Sciamma

Deux ans après le triomphe du « Portrait de la jeune fille en feu », Céline Sciamma troque les costumes d’époques pour des cabanes d’enfants. « Petite Maman » sort ce mercredi 2 juin. Il se veut le film le plus intimiste de la réalisatrice mais aussi le plus miyazakien. La réalisatrice/scénariste questionne le deuil et l’apprentissage dans le même film, et c’est puissant.

 

 

Après être passé par le festival de Berlin, le film nous arrive presque intact tant l’écho dans la presse sur ce « petit » film à hauteur d’enfant est faible. Nelly (Joséphine Sanz) a huit ans. Sa grand-mère vient de disparaître. Alors que ses parents s’occupent de ranger leur maison, la petite fille s’en va chasser l’ennui à l’extérieur. Mais une autre perte se joue, celle de la mère qui quitte subitement le domicile familial. C’est peu après ce drame que Nelly rencontre une fille de son âge dans les bois (Gabrielle Sanz) : elle porte le même prénom que sa mère…

C’est au cœur de relations complexes mais douces que Céline Sciamma installe sa caméra. La maman disparue étant redevenue petite fille, qui de Nelly ou de Marion est la mère de l’autre ? Est-ce un voyage dans le temps ou l’apparition d’un fantôme ? Le film donne quelques réponses, qu’on vous laissera découvrir. Car oui, sous ses traits minimalistes, l’œuvre de Sciamma intègre, par petites touches, des éléments fantastiques.

La relation que Nelly va entretenir avec Marion, sa nouvelle amie, est basée sur l’apprentissage. Ensemble, ces deux personnages bâtissent un monde à leur hauteur, suffisamment fort pour ne pas sombrer dans l’ennui ou le deuil. Avec des cabanes, des jeux de rôles et des dessins, les deux gamines se battent pour l’insouciance… C’est ici que se cache peut-être la référence au maître de l’animation japonaise Hayao Miyazaki. Comme Chihiro, l’imaginaire des enfants est d’une telle puissance qu’il peut combattre les maux les plus horribles : l’abandon, la mort. Comme Chihiro, les fillettes vont créer leur propre univers, leur propre monstre pour se défendre. « Petite Maman » est aussi un voyage dans l’imaginaire enfantin. Un tour de force pour la cinéaste qui nous plonge dans le quotidien fantastique de deux enfants.

On pense évidemment à quelques films de référence sur l’enfance . Céline Sciamma, qui a toujours traité ce thème dans son travail (« Naissance des Pieuvres », « Tomboy » etc.) prouve que les histoires d’enfants ont encore toute leur place dans le cinéma. Les deux gamines tiennent le film à elles seules. Rien que pour ça, il faudrait courir voir « Petite Maman », rien que pour ça il faudrait dire que derrière « Petite Maman » se cache un grand film.

Pour son cinquième long métrage, la plus engagée et importante cinéaste française prend le temps de faire un petit film et c’est tant mieux. On apprécie les réalisateurs, qui, entre deux grosses productions, se posent pour travailler autrement. Filmer l’enfance est un exploit rare que seuls quelques rares cinéastes comme Miyazaki ont su réaliser. C’est aussi une promesse pour tout le cinéma de Sciamma à venir. Elle nous prépare, sans doute, à un prochain long-métrage encore plus fort sur le même thème. On a hâte de voir comment « Petite Maman » va faire sens dans son travail.

 

« Petite Maman » de Céline Sciamma, France, 2021, 1h12, avec Joséphine Sanz, Gabrielle Sanz, Nina Meurisse…

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