CANAL + Kids présente ce dimanche 30 janvier le premier épisode d’une série de trois documentaires de Martin Meissonnier : « Le bonheur à l’école ». Un voyage passionnant d’Estonie à Londres, de la France à l’Inde ou l’Allemagne à la rencontre d’écoles innovantes où les enfants ont le sourire. « Le bonheur à l’école », c’est aussi une plate-forme dédiée aux acteurs de ce « réenchantement de l’école » où seront montrés d’autres films en accès libre.
Décrochage, effondrement des savoirs fondamentaux, crise de l’orthographe, malaise des professeurs, violence : l’école traverse une crise aigüe. De nombreux enfants, s’y ennuient, y souffrent. Comment aborder ce déphasage vertigineux de l’école avec les Digital Native ? Comment agir pour que tous, enseignants et élèves, y retrouvent du sens et du plaisir ?
Les 3 documentaires de Martin Meissonnier nous font voyager dans une dizaine de pays, à la rencontre de tentatives isolées mais originales et fructueuses. Et partant souvent du désir des enfants. A Berlin, les élèves de la Conrad-Schule passent une bonne partie de leur journée dans la forêt (et se roulent dans la boue sans se faire réprimander/photo). A Colombes, en banlieue parisienne, on forme des enfants à jouer les médiateurs avec des résultats spectaculaires. En Estonie, champion européen de l’enseignement en ligne, on apprend à construire des drones. Au Portugal, à Alcanena, on a instauré la méditation de pleine conscience. A Kirirom, au Cambodge, les murs de la Coconut School sont faits de bouteilles recyclées récupérées par les élèves. En Belgique, à Etterbeek, on joue au calcul mental debout avec un ballon qu’on envoie sur un grand tableau interactif pour cocher les bonnes réponses. Gym et maths en même temps…
LOKKO : Après de nombreux documentaires à votre actif, pourquoi ce sujet ?
Martin Meissonnier : Après mon documentaire sur « Le bonheur au travail », j’avais envie de traiter le bonheur à l’école en partant du fait que si les gens étaient si mal au travail c’est qu’ils avaient pu être malheureux à l’école. Nous sommes dans une société en crise où les apprentissages manquent terriblement d’imagination et de curiosité. En même temps, les entreprises cherchent des gens agiles et très diplômés… Pour moi, la source du problème est à l’école. On n’a pas appris aux gens à être indépendants et à apprendre. C’est pourtant essentiel dans la vie.
Vous-même avez-vous été malheureux à l’école ?
Très malheureux, oui. Je me suis fait mon école à moi tout seul ! Mes professeurs ont été des mentors que je me suis choisis, et qui m’ont accompagné, mais en dehors de l’école.
Comment s’est fait le repérage et le choix des écoles ? Il y a des choses très différentes dans ces propositions.
On a choisi d’abord des thèmes. Ils sont trois, un par épisode : « Apprendre à apprendre », « Connexion/déconnexion », « Citoyens de demain ». Les choix ont été faits en fonction de ces thèmes. Il y a eu des rencontres et aussi des recommandations venues de fondations comme la fondation Ashoka, pour l’école d’Ahmedabad en Inde. L’école de Bratsch est une idée d’une co-productrice suisse qui nous a signalé cette petite école géniale dans un village abandonné, en haut de la montagne.
L’Estonie, ce petit pays qui fait des prouesses dans le numérique, est une des sensations de votre documentaire.
J’ai fait pas mal de films sur l’internet, j’avais donc déjà beaucoup entendu parler de l’Estonie, vraiment le pays du numérique. Ils sont passés au numérique bien avant tout le monde. Ils ont 25 ans d’avance sur nous !
Y a-t-il une école qui vous ait laissé un grand souvenir ?
Elles ont toutes quelque chose. L’école en Inde est extraordinaire. L’école suisse m’a impressionnée. En Afrique du Sud, il y a des choses étonnantes. Il y en a des écoles fantastiques partout dans le monde. Y compris en France ! Il y a plein de gens qui cherchent, tous dans leur coin. Grâce à la plate-forme, une sophrologue du Luxembourg m’a appelé hier pour me raconter qu’elle avait mis au point des cours en dessins animés qu’elle a ensuite vendu à 150 écoles dans plusieurs pays. Partout dans le monde, il y a un nombre impressionnant d’initiatives pour réinventer l’école. Je suis très étonné par cette créativité.
Que vous inspire ce vœu de Valérie Pécresse : « Je veux une école où les élèves se lèvent quand le maître rentre dans la classe » ? Y a -t-il un problème français avec l’éducation ?
Ces gens vivent au 19ème siècle… Les chiffres du décrochage scolaire sont inquiétants. Il y a un développement des phobies scolaires. Il faut aller repêcher ces enfants mais je doute qu’on puisse le faire comme ça. On doit d’abord préparer les enfants aux métiers de demain, à l’intelligence artificielle, au travail manuel, au « care ». On n’a pas besoin d’avoir tous la même éducation. Il faudra être de plus en plus flexible, et surtout, avoir appris à apprendre, à s’adapter.
Dans ce documentaire d’ailleurs, vous n’abordez pas l’épineuse question des enseignements fondamentaux. On voit des enfants très heureux, accros à l’école pour certains, mais qui ont l’air d’être en vacances !
J’ai eu des critiques de prof là-dessus, qui regrettent qu’on n’ait pas traité ce sujet. Je suis d’accord avec eux mais je n’avais que trois heures ! Il fallait un parti-pris. Ensuite, ce n’est pas un documentaire franco-français. Ce n’est pas tout à fait mon sujet. Je voulais surtout montrer des choses que les gens ne connaissent pas, dans le monde entier. Ces enseignements fondamentaux, il ne faut pas les écarter. Savoir écrire et s’exprimer est fondamental. Une culture générale et historique, c’est important. Mais on doit donner toutes leurs chances aux enfants pour le monde réel. Je me demande encore pourquoi, enfant, j’ai passé tellement d’heures à apprendre « les maths modernes » ! Personne ne m’expliquait à quoi ça pourrait me servir.
On a surtout voulu montrer comment on peut donner du sens à l’école. D’ailleurs, l’association « Le sens de l’école » à Paris m’a contacté récemment pour une collaboration. Ils font des ateliers avec des CM1 et des CM2 pour qu’ils comprennent pourquoi ils vont à l’école… Le documentaire montre aussi que les écoles qui ont les meilleurs résultats sont celles qui arrivent à faire travailler les jeunes, non pas les uns contre les autres, avec un esprit de compétition mais ensemble, en groupe. Ceux qui le font règlent souvent mieux les problèmes de harcèlement. J’avais envie d’être positif. Taper sur tel ou tel ne sert à rien, de toute façon.
La question de l’école dans les quartiers « difficiles » est abordée à travers l’expérience des petits médiateurs de Colombes dans les Hauts de Seine (photo). Apparemment efficace !
Très efficace. Absolument. Il y a une trentaine d’écoles qui font ça dans la région parisienne. Ces jeunes médiateurs sont très émouvants. Dans le même esprit, quand on vit le chaos de la ville d’Ahmedabad, en Inde, et qu’on entre dans cette école où nous avons tourné, on a vraiment l’impression d’être dans un autre monde. C’est de la science-fiction !
Il y aura d’autres épisodes ?
Après ces trois documentaires exclusifs pour Canal Plus, il y en aura d’autres sur notre site. On a un tournage prévu en Afrique du Sud, en Estonie, en Belgique. Depuis le lancement de la plate-forme, il y a plein d’écoles -d’Inde, d’Israël- qui nous écrivent pour partager leur expérience. J’ai été sollicité aussi par une école dans un jardin à la Réunion… On va aller en filmer certaines. Et puis, il y a les nombreux tournages qui ont été mis en stand-by à cause du Covid : le Canada, la Finlande, les Etats-Unis.
L’expérience est prolongée par la plate-forme : comment ça se passe, tout le monde peut déposer son innovation ?
Non, non, c’est filtré. Mais jusqu’à présent, nous n’avons eu que des offres de qualité. C’est à chaque fois toujours intéressant.
LE BONHEUR À L’ÉCOLE
–Le documentaire
Une série documentaire en 3 épisodes inédits de 52 minutes de Martin Meissonnier sur CANAL+kids et sur myCANAL
-« Apprendre à apprendre », dimanche 30 janvier à 21h, coréalisé par Katell Paillard.
- « Connexion/déconnexion », dimanche 13 février à 21h.
- « Citoyens de demain », dimanche 13 mars à 21h.
Produit par Les Productions Campagne Première et Oü Vesilind. Un projet soutenu par la Fondation Bettencourt Schueller qui a co-financé le film et la plate-forme.
-La plate-forme
Dans le prolongement du documentaire, un site présente « des initiatives mises en œuvre pour réenchanter l’école ». Gratuite, bilingue anglais-français et participative, elle « donne la parole aux acteurs de l’éducation pour faire bouger les lignes ».
Le site : www.lebonheuralecole.org
Facebook : https://www.facebook.com/lebonheuralecole
Crédit photos : Philippe Lévy.