Michel Polac, le libre arbitre

Voilà dix ans, en 2012, que l’on portait en terre Michel Polac à Cabrerolles dans l’Hérault. L’Œil du témoin, un site dédié au cinéma français, sort à l’occasion un documentaire sur le célèbre journaliste de “Droit de réponse”, la grande émission du samedi soir dans les années 80. Et un de ses films : “La Sourde Oreille” avec Charles Denner.



La Comédie du Livre pourrait se souvenir de cet anniversaire car Polac était un homme de médias mais aussi un écrivain. De ceux qui ont toujours cherché à faire l’éloge, à l’image d’un Pierre Dumayet, et donc à populariser la lecture. Soit au micro soit à l’écran (même petit de taille). 

Porter en terre : l’expression trouvait là tout son sens. Le corps de Michel Polac avait été mis en terre selon sa volonté, dépourvu de cercueil dans le petit cimetière de son ultime domicile connu, Cabrerolles non loin de Bédarieux. J’y étais, aux côtés de l’urgentiste Patrick Pelloux fort remonté et en colère. Pelloux représentait alors la rédaction de “Charlie Hebdo”. Hebdo au sein duquel Polac tenait un temps une chronique littéraire. Personne n’avait daigné se déplacer en ce mois d’août 2012. Ni Laurent Ruquier en tête avec lequel Michel Polac avait travaillé, composant un binôme avec un certain… Éric Zemmour dans l’émission “On n’est pas couché” de 2006 à 2007. Et laissant sa place ensuite pour raison de santé à Éric Naulleau. Ingrat pour celui qui avait provoqué une véritable fièvre du samedi soir avec “Droit de Réponse”, foire d’empoigne hebdomadaire où s’exprimait une liberté inimaginable aujourd’hui, la bande à “Charlie Hebdo” ou “Hara-Kiri” y ayant table ouverte. Le tout sous un épais nuage de fumée. L’émission pourtant culte ne survivra pas à la privatisation de TF1 par l’industriel Bouygues aux gros moyens mais à l’humour passablement limité. Le journaliste montpelliérain Frank Tenaille a retracé l’ensemble de cette histoire en compagnie du principal intéressé dans un livre passionnant : “Polac, droit de se taire”. 

Ce qu’on sait moins, c’est qu’il avait été aussi – en plus de tout le reste – cinéaste. Pour le grand écran, il y a eu “La Chute d’un corps” en 1973 avec Marthe Keller et Daniel Ceccaldi. Mais aussi metteur en scène pour le petit écran et dans le même temps (de 1971 à 81). En plus de ses 5 films, on lui doit 6 téléfilms. En fidélité avec un autre Michel, Portal celui-là, signant régulièrement les bandes-son de ses réalisations. Des fidélités aussi avec l’extraordinaire Judith Magre, 95 printemps, que l’on retrouve aux côtés de ce si cher à notre cœur Charles Denner (1926-1995) dans “La Sourde Oreille” (*). Le film, moins connu que le mythique “L’homme qui aimait les femmes”, datant de 1980, que la géniale maison d’édition “L’Œil du témoin” a la lumineuse idée d’exhiber des archives de l’INA. Somptueux cadeau que nous fait ainsi ce bien méritant éditeur car le DVD est sorti accompagné du documentaire “Charles Denner, le chercheur inquiet” de 55 minutes réalisé par Avril Tembouret. Lequel ravira les admirateurs de l’atypique mais si bouleversant acteur. 

Un bonheur n’arrivant jamais seul, la même maison nous offre également à découvrir : “Monsieur Jadis”, avec Claude Rich, une autre réalisation de Michel Polac d’après le livre phare d’Antoine Blondin (1922-1991), écrivain aussi économe en lignes – une dizaine de livres en près de 40 années de présence littéraire – qu’il avait le vin et le pastis généreux. Un très beau documentaire sur Blondin : “La Politesse du désespoir” de Roland-Jean Charna de 32 minutes nous aide à mieux redécouvrir cet écrivain amoureux de la petite reine dont les chroniques sur le Tour de France pour le quotidien “L’Équipe” sont cultes. Mais Blondin aussi pilier de comptoir dont notre ami Pierre Barouh (1934-2016) racontait volontiers qu’il le ramenait assez régulièrement sur son dos après des tournées généreusement arrosés du côté des Abbesses ou de la Place du Tertre à Paris (18ème). Cette réédition permet de découvrir un documentaire “Du vague à l’âme”, de Roland-Jean Charna, sur Polac lui-même, à la personnalité aussi complexe que controversée.

“La sourde oreille” de Michel Polac
Pour acheter le DVD, cliquer ici
. Pour la bande-annonce des deux téléfilms de Polac qui sortent en DVD chez “L’Œil du témoin”, cliquer ici.

(*) Ludovic Fumet, violoncelliste et musicien frustré, se prête à une expérience qui va temporairement le rendre sourd. Surpris par les bienfaits cette soudaine surdité, Ludovic va simuler cet handicap auprès de sa femme et de ses proches, se réjouissant de “ne plus entendre” à la fois les conversations banales de l’existence à deux et les agressions sonores du quotidien. Néanmoins il lui faudra bien retrouver sa faculté d’audition pour séduire Lucie et composer avec son avocat qui lui propose une escroquerie à l’assurance.

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Jeanneret
Jeanneret
2 années il y a

Super papier merci Jean de Laguionie !!

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