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Une Aïda multiculturelle en ouverture de saison

En ouverture de la saison lyrique de l’Opéra Orchestre de Montpellier, « Aïda » de Verdi triomphe dans une version contemporaine, pacifiste et délibérément multiculturelle. 

Opéra grandiose destiné à célébrer l’inauguration de l’Opéra du Caire en pleine période coloniale, « Aïda » reste l’opéra de Verdi le plus propice à des débauches de costumes, de figurants et de décors délirants. Mais cette lecture « peplum » de l’opéra verdien laisse parfois dans l’ombre la complexité musicale et un message politique pacifiste.

Le choix de la Syrie

La mise en espace d’Annabel Arden propose une subtile mise en perspective des ravages de la guerre et un éclairage moderne des protagonistes, Aïda et Radamès, prisonniers du fanatisme religieux et nationaliste. Les images d’immeubles en ruines projetées sur un drap sont celles des rues d’Alep mais pourraient tout autant venir de Boutcha ou d’ailleurs.

C’est donc une version scénique originale que propose North Opera qui réunit sur le plateau du Corum, l’orchestre, les chœurs et les chanteurs. Sur l’avant-scène en treillis ou complets vestons, les chanteurs évoluent dans un décor épuré : une table, des chaises et une porte symbolique se transforment en un véritable univers grâce à la formidable mise en lumière et en couleur de Kevin Treacy.

Au second plan, l’orchestre remplit l’espace et profite d’une acoustique idéale sous la baguette du chef letton Ainãrs Rubikis. Le troisième plan s’équilibre entre l’écran de projection et les chœurs de Montpellier et Nice réunis dans une posture de théâtre grec antique, alternant chorégraphies gestuelles et immobilité statuaire.

Ainãrs Rubikis à la force de la baguette

Le pari de ce type de mise en scène se gagne à la force de la baguette avec une interprétation musicale sans failles. Ainãrs Rubikis révèle à la tête de l’orchestre montpelliérain toutes les nuances de la partition. Il assume toute la brillance des effets grandiloquents tout en révélant la grande finesse des scènes intimistes : des cordes intenses et veloutées, des percussions habilement maîtrisées et des pupitres de vent très subtils malgré un flottement des trompettes en si dans le toujours très attendu thème de la marche triomphale.

Sunyoung Seo : somptueuse soprano coréenne

Choix assumé par Valérie Chevalier directrice de la maison d’opéra de Montpellier : la distribution associe des artistes d’origine africaine, asiatique et européenne. Deux coups de cœur incontestés chaleureusement salués par le public : la soprano Cyrielle Ndjiki Nya (à la UNE) qui illumine le rôle de la grande prêtresse de Ptah de son joli timbre raffiné. Dans le rôle-titre, la soprano coréenne Sunyoung Seo (ci-dessus) emporte tout sur son passage : la voix est somptueuse, tout à la fois puissante et souple. Le timbre est pur et son incarnation à la musicalité sans faille reste émouvante d’un bout à l’autre.

Son alter ego masculin le ténor tunisien Amadi Lagha campe un Radamès guerrier (photo ci-dessus). Le timbre est musical, la voix puissante dans le haut médium malgré quelques voyelles de style « bel canto italien » qui le mettent en difficulté passagère. La scène finale au tombeau est finement interprétée. L’Amnéris de la mezzo géorgienne Ketevan Kemoklidze est une réussite théâtrale (photo). Vocalement, elle manque manque parfois de volume face à la puissance de l’orchestre.

Mention spéciale pour le jeune baryton coréen Léon Kim (ci-dessus) qui, même affublé d’un poncho andin un brin anachronique, campe un Amonasro altier et royal grâce à un joli timbre alternant puissance et douceur. Les seconds rôles sont très bien servis par Jacques-Greg Belobo et Jean-Vincent Blot, deux voix de basse qui allient solennité et profondeur.

Un message de paix

Les derniers mots de l’œuvre de Verdi reviennent à Amneris qui implore la paix pour son peuple, sans doute le message le plus contemporain de cette version très réussie d' »Aïda » fort bien accueillie par un public qu’on a parfois connu plus frileux face à l’originalité.

Photos Marc Ginot.

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MARCAIS
MARCAIS
2 années il y a

SUPERBE

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