La montpelliéraine Mia Mandineau a connu la célébrité avec ses vidéos de vulgarisation de l’opéra sur Youtube mais c’est aussi une chanteuse en pleine ascension qui a reçu en janvier le prix Laffont du Metropolitan Opera de New-York (en arrière plan sur la photo).
Petit minois espiègle, vivacité et humour : difficile de ne pas succomber à la Miamania qui a déferlé sur la toile depuis maintenant sept ans ! Pour ceux qui ignorent encore l’univers de la jeune soprano Mia Mandineau, la découverte de ses formats Youtube L’opéra et ses zouz ou encore J’te résume seront sans doute une bonne surprise. Avec une volonté affichée de se démarquer des standards compassés voire élitistes du monde de l’Opéra, elle y applique un « gai savoir » et pitche avec légèreté et humour les arguments des grandes œuvres de l’art lyrique.
A grand renfort de clins d’oeil et grimaces, de supports de toutes sortes : collages, graff, pâte à modeler mais sans lésiner sur le contenu et son érudition, elle vous résume l’essentiel de Carmen, Fidelio ou encore Les Noces de Figaro. C‘est astucieux et drôle et visiblement populaire ! Forte de ses 21 000 abonnés, devenue une influenceuse bankable invitée à l’Opéra de Paris, elle s’offre également le luxe d’aborder des sujets plutôt tabous comme l’influence des cycles hormonaux sur la voix des chanteuses.
On l’a vue l’été dernier au Printemps des Comédiens dans la mise en scène de Marion Coutarel, Ismène, avec sa mère la comédienne Mama Prassinos (avec elle sur la photo).
Mais Mia Mandineau, c’est aussi une voix et une carrière. La jeune chanteuse poursuit ses études aux Etats-Unis, à la Suny Fredonia School, et vient d’obtenir en janvier 2024 le prix Laffont du Metropolitan Opera de New-york. Un concours prestigieux destiné à découvrir de jeunes chanteurs d’opéra prometteurs et les aider dans le développement de leur carrière. A cette occasion, elle partage avec LOKKO, depuis les USA, son rêve américain.
« On parle plus de la diversité que de #MeToo aux USA »
LOKKO : A peine six mois après votre arrivée, vous voilà lauréate d’un prix prestigieux, est-ce une opportunité pour une carrière aux Etats -Unis ?
MIA MANDINEAU : C’est surtout l’aboutissement d’années de travail ! Après Amsterdam puis Athènes où j’ai poursuivi mes études au conservatoire, je suis actuellement en 1ère année de master à la Suny Fredonia School dans l’état de New York. J’ai obtenu une bourse pour entrer dans cette université et j’y travaille aussi comme assistante. Je finance mes études avec les podcasts sur Youtube qui sont rémunérés mais pour pouvoir envisager de m’installer ici pour deux années d’études, j’ai lancé une campagne de financement participatif auprès de mes followers qui a rapporté 12 000€ .
De plus chaque audition pour les concours est payante…
Oui, tout est terriblement cher : pour se déplacer sur New-York pour une audition par exemple, il faut payer un hôtel et les frais d’inscription ! Je travaille pour payer mes études, j’ai la chance grâce à mes podcasts d’avoir un contrat avec France 4. Je présente une chronique régulière depuis les USA dans l’émission Culture Box.
Pour ce concours vous avez présenté plusieurs œuvres ?
Le programme doit comporter quatre airs d’opéra. J’ai choisi mon premier morceau, un air de Vitellia dans La Clémence de Titus de Mozart. Le jury a choisi le deuxième : un extrait de l’opéra The Hours de l’américain Kevin Puts, un opéra créé l’année dernière. Ce prix est une grande chance et m’a offert des opportunités très excitantes.
Vous avez des projets dans l’immédiat ?
Oui, j’ai la chance d’avoir décroché le rôle de soprano dans une création : Having Guest for Dinner, c’est une coproduction entre la Suny Fredonia school et le New York Chamber Orchestra, une comédie à l’humour très noir un peu gore. J’ai aussi l’immense joie d’avoir été embauchée pendant l’été 2024 dans un festival prestigieux, le Wolf Trap festival dans l’état de Virginie (ndlr : festival très réputé, non loin de Washington qui invite en résidence de jeunes artistes lyriques). Je vais également auditionner pour un concours avec l’orchestre de chambre de N.Y en mars 2024 .
En France, plusieurs affaires d’agressions sexuelles font la une de la presse. Aux Etats-Unis, le mouvement #metoo a-t-il fait bouger les lignes ? Et se sent-on en sécurité quand on est une jeune chanteuse ?
Non, on n’est jamais en sécurité. D’ailleurs, en France, la soprano Chloé Briot a été une des premières à parler et ici, aux U.S.A, plusieurs chanteuses ont pris la parole pour dénoncer des faits d’agression sexuelle. Cependant, il y a, ici, une volonté manifeste de traiter le problème : en tant qu’étudiante, j’ai suivi une formation de lutte contre le harcèlement. Quand on signe un contrat, il y a une personne attitrée pour veiller à prévenir ce genre de situation et dans les compagnies d’opéra, il y a maintenant un référent coordinateur, spécialement dédié à traiter ces problématiques. Mais ce n’est pas la préoccupation principale. Le monde artistique est vraiment vigilant sur la diversité. Que ce soit dans les concours, dans les spectacles, sur les planches : veiller à offrir une chance à tous sans discrimination de classe ou d’origine ethnique. Voilà ce dont tout le monde parle !