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À Visa pour l’image, GAZA au centre de tous les regards

Dans la bande de Gaza, seuls sont autorisé.e.s les journalistes palestiniens. 108 y ont perdu la vie depuis un an. Le festival international de photojournalisme, qui se termine ce week-end à Perpignan, a donné ses prix les plus prestigieux à 3 photojournalistes gazaouis, pour leur puissant et insoutenable travail de documentation sur la guerre : Loay Ayyoub, Hahmud Hans et Samar Abu Elouf.

Au Festival Visa pour l’image de Perpignan, chaque photographe est présenté en début d’exposition. Sous l’affiche du jeune gazaoui de 29 ans, Loay Ayyoub, un petit panneau précise : les images présentes dans cette salle peuvent heurter notre jeune public. Mais ces images heurtent de plein fouet les adultes aussi. En quelques minutes, on fait le plein de désespoir et de désolation.

Pour Louis Aliot, un lauréat trop proche du Hamas

Pour ces photos, le photographe palestinien a reçu, le samedi 7 septembre, le Visa d’or de la ville de Perpignan Remi Ochlik 2024, (prix du Jeune reporter) que le maire RN de la ville, Louis Aliot, a refusé de lui remettre, s’estimant « mal à l’aise avec le traitement de cette guerre », allant jusqu’à remettre en cause la probité de Loay Ayyoub en assurant qu’il aurait préféré que le prix récompense « un journaliste totalement indépendant du Hamas ». Une amorce de polémique par ailleurs inutile puisque le jeune homme n’a pas quitté l’Egypte par crainte de ne pouvoir y retourner ensuite pour des histoires de visa (sur la photo avec le directeur du festival, Jean-François Leroy). Il a, par message vidéo, dédié son prix à tous les journalistes tués à Gaza pendant l’exercice de leur fonction et tous les autres morts de cette guerre. 

Au lendemain de l’attaque par le Hamas de civils israéliens faisant 1200 morts, le photographe a documenté la guerre à Gaza, pour le Washington Post, jusqu’en février 2024, date à laquelle il a été obligé de fuir avec sa famille. Le résultat est saisissant d’abord par la qualité indéniable du cadrage, de la lumière et du sens de la composition et par  la force de chaque image qui plonge le spectateur dans le chaos et la sidération. 

Depuis octobre 2023, le gouvernement israélien interdit l’accès de la bande de Gaza à tous les journalistes, n’hésitant pas à cibler des attaques sur des journalistes. Les seules rares images sont celles des photojournalistes palestiniens. Sans images, les combats restent flous et les batailles ne sont parfois que des mots. Dans l’objectif de Loay Ayyoub, tout pue la mort et le sang.

La réalité sort de sa boite telle un diable et nous donne à voir sans filtre les cadavres de ces enfants et les décombres qui ensevelissent leurs familles. Des hommes courent et traversent la rue en hurlant, dans leurs bras des enfants blessés, vêtements déchiquetés. Plus loin un ambulancier hagard devant la porte de la morgue porte enveloppé dans une couverture, le corps d’un tout petit tué par une frappe israélienne. Dans son regard, une fatigue immémoriale. Vient ensuite le défilé de ces parents ensanglantés, hébétés de douleur qui portent leur enfant mort dans les bras, une mère au visage de madone qui serre un linceul ensanglanté ou celle-ci qui berce les corps de ses jumeaux tous deux morts dans un bombardement.  

« Mon devoir en tant que photographe »

Sans jamais tomber dans l’esthétisme ni la fascination morbide, Loay Ayyoub réussit à plonger les visiteurs dans une réalité qui surprend encore : « montrer la crise humanitaire à laquelle sont confrontés les populations civiles de Gaza, témoigner de leurs difficultés à accéder aux soins et à la protection était mon objectif au quotidien et mon devoir en tant que photographe. » 

« Dire au monde que les souffrances doivent prendre fin »

« J‘espère que nos photos disent au monde que cette guerre et les souffrances doivent prendre fin ». Ce sont les mots de Hahmud Hans, collaborateur de l’AFP, qui a remporté le Visa d’or news pour des images tentant de documenter la situation catastrophique des civils à Gaza : les morts, les populations déplacées et la famine qui s’installe. Une tentative pour témoigner à hauteur d’images des 40 000 morts que l’enclave a dû décompter depuis bientôt un an. 

Samar Abu Elouf (New York Times) a reçu elle, le Visa d’or de la presse quotidienne pour son reportage photo réalisé à Gaza. Une image parmi tant d’autres : celle de Khaled Joudeh .Ce petit garçon de 9 ans écarte en sanglotant le linceul qui entoure la tête de sa petite sœur Misk. Il l’a trouvée alors qu’il cherchait dans les décombres les corps de ses parents. Nous sommes en octobre 2023. Khaled et son frère Tamer (7 ans ), seuls survivants de cette famille, vont s’abriter avec des cousins dans la maison familiale. C’est là qu’une frappe aérienne en janvier 2024 viendra tous les tuer. 

Face à une opinion internationale qui accentue la pression sur le gouvernement Netanyahou , la prise de conscience de l’urgence à Gaza passe aussi par ce qui pourrait être une véritable arme de guerre : les images des photographes présents sur ce conflit malgré le risque. Pour rappel, 108 journalistes ont perdu la vie à Gaza depuis un an. 

 

Festival Visa pour l’image : entrée libre tous les jours de 10h à 20h jusqu’au 15 septembre. La majorité des expositions peut être visitée virtuellement sur le site internet du festival. 

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